mercredi 17 décembre 2014

2014 en musique ♪ ♫

Chers toutes et tous, 

L'an neuf approche à grands pas et il m'est venu l'envie de partager avec vous mes découvertes (et confirmations) musicales de 2014. 

Loin de moi, par contre, l'idée d'établir un classement des meilleurs sorties de cette année. 

Il s'agit davantage de dresser, en toute subjectivité et sans ordre particulier, la liste des albums (15 en l'occurence) que je réécouterai selon moi dans un, deux voire, qui sait, cinq ans.

Et vous, qu'est-ce qui a titillé vos oreilles cette année?

Bonne écoute, bonne(s) découverte(s), et d'ores et déjà bonnes fêtes!  

Mes albums 2014 

Vous pouvez trouver tous ces albums dans la playlist en bas de page. Il suffit de scroller.

♪ Flying Lotus - You're Dead
♪ Chet Faker - Built on Glass
♪ Jungle - Jungle
♪ Lone - Reality Testing
♪ Slackk - Palm Tree Fire
♪ Caribou - Our Love
♪ Kiasmos - Kiasmos
♪ Guts - Hip Hop After All
♪ Fakear - Sauvage
 Jhene Aiko - Souled Out
♪ Odesza - In Return
♪ How to Dress Well - What is This Heart?
♪ Beck - Morning Phase
 Owen Pallett - In Conflict
♪ Run the Jewels - Run the Jewels

2014 en musique



RF

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Ce billet a été rédigé en écoutant l'album "Black Messiah" de D'Angelo

vendredi 5 décembre 2014

Il y a quelque chose de pourri en France

La récente réélection de Marine Le Pen à la présidence du FN marque en quelque sorte le lancement de la campagne pour les élections présidentielles françaises de 2017. Candidate dors et déjà en ordre de marche, elle et son parti bénéficient d'une longueur d'avance (de plusieurs mois, voire d'années) sur leurs concurrents directs, à l'UMP et au PS principalement. Car, en attendant la désignation des candidats de droite et de gauche (après, on peut le redouter, nombre de déchirements, coups fourrés et surprises), Marie Le Pen peut déjà mettre en oeuvre son plan de bataille (commencé il y a déjà plusieurs mois/années), imposer ses sujets, façonner ses messages. Ne laissant qu'aux autres la possibilité de se positionner par rapport à ses thèmes. 

La France, comme beaucoup de pays européens, est traversée par plusieurs crises. On retrouve dans trois d'entre elles (au moins) les éléments qui ont permis et permettent au Front National non seulement de progresser dans les sondages et les élections, mais également de s'implanter dans le paysage politique et social français : 

  • Crise économique : le taux de chômage, la perte de pouvoir d'achat, la perte de la compétitivité de l'industrie française, les fermetures d'entreprises, la paupérisation de la société, tout cela contribue à un climat de plus en plus morose et attise les frustrations de (certaines franges de) la population. 

  • Crise identitaire : la perte du statut de la France sur la scène internationale, le French-bashing à répétition, la perception d'une perte de certaines valeurs fondamentales, le manque de vision pour le futur. Ces éléments brouillent les repères et enlèvent aux citoyens une chose à laquelle ils peuvent s'accrocher en périodes difficiles. 

  • Crise politique : les scandales (entre autres Bygmalion, Cahuzac, Thévenoud, etc.), les guerres intestines (Copé vs Fillon, frondeurs vs gauche gouvernementale, Sarkozy vs Juppé, etc.), les réglements de comptes (dans des livres, dans les médias), les trahisons, etc., offrent aux Français un cirque quotidien dans lequel les principaux intervenants sont de pâles caricatures d'eux-mêmes et contribue à accentuer la méfiance et le mépris envers les politiciens. 

    S'ajoute à cela la distance qui s'est accrue entre les préoccupations des citoyens et les discours et actions des dirigeants politiques, ainsi que les promesses non tenues (parmi elles, la fameuse inversion de la courbe du chômage). 

Ces crises ont, entre autres, pour effet les réactions suivantes, du moins pour une certaine partie de la population : 

  • Un sentiment d'abandon, de désintérêt généré par les discours et actions d'une grande partie des décideurs politiques.  

  • Un désir de retour au passé car ce dernier paraît réconfortant, rassurant, meilleur, plus glorieux. Non pas que tout était rose avant, mais au moins on sait ce qu'il en était, alors que maintenant on manque de répères. 

  • Un repli sur soi. La peur de perdre ce qu'on a (comme traditions et matériellement) pousse à l'individualisme, à mettre son groupe en premier, de sorte à créer des discours (et des actes) de "nous contre eux", de rejet, de division.
  • Une perte de confiance dans le personnel politique "traditionnel", c'est-à-dire celles et ceux qui ont exercé et qui exercent un mandat politique, de préférence de niveau national. Cela a pour conséquence une forte abstention aux élections (plus de 57% des électeurs français inscrits n'ont pas voté aux dernières européennes, soit plus de 26 millions de personnes), un vote pour les extrêmes, un accroissement du sentiment de tous pourris. 
Face à leurs préoccupations, les citoyens sont sensibles aux appels d'une oreille qui est à leur écoute, ou du moins qui en donne l'impression. Et qui, en plus, permette de leur donner des solutions, toutes simples et simplistes qu'elles soient. 

Pendant au moins dix ans, representants politiques, médias et politologues ont répété que si rien n'était fait, si rien n'était changé dans la relation entre pouvoir et citoyens, un jour le FN s'emparerait de plusieurs municipalités. Hénin-Beaumont étant la ville la plus redoutée. Que s'est il passé il y a quelques mois ? Et qu'a-t-il été fait ces dernières années pour éviter cela ? Rien, mis à part crier au loup. 

Mais crier au loup, seulement et simplement, sans apporter d'alternatives, sans se remettre en question, sans se demander pourquoi ce loup a autant de succès, n'a contribué qu'à apporter de l'eau à son moulin. Et l'a placé en alternative réelle de celles et ceux qui occupent le pouvoir. 

En essayant de diaboliser le parti, tout en lui permettant de s'exposer mediatiquement, cela l'a transformé en victime et n'a fait que légitimiser son existence comme parti anti-politiciens traditionnels, contre le soi-disant establishment, le système en place. Cela pouvait peut-être tenir tant que la situation socio-économique ne vacillait pas trop. Mais une fois que le discrédit contre le pouvoir (et ceux qui l'occupent) a gagné en ampleur, la valeur refuge a été soit l'absentionnisme soit le vote pour les extrêmes. Et le FN a su canaliser très justement ces sentiments de frustration et d'agacement. Mieux, il a réussi a non seulement recuellir les votes de rejet des partis traditionnels, mais fédère de plus en plus d'adhésions à son programme. 

Ce qui semble pourri en France, ce n'est pas tant le FN (au contraire il se porte bien) ou ses électeurs (ils ont repris confiance), mais bien la politique traditionnelle et surtout le manque de réaction des politiciens, l'absence de tentative de compréhension des hommes et femmes politiques, qui ne semblent pas se soucier des besoins et préoccupations des électeurs du FN et des abstentionnistes. Qui, au contraire, donnent l'impression de s'en débarasser d'un revers de la main. Qui paraissent davantage guidés par la prochaine échéance électorale et par les intérêts de leur propre groupe. Car diaboliser et tourner en ridicule le vote de plus de 4,5 millions de Français (voix récoltées par le FN aux dernières élections européennes), tenter de culpabiliser la vingtaine de millions d'abstentionnistes, c'est les insulter et les pousser davantage dans leur décision. Ce qui pose problème, c'est le pourrissement d'une situation (abstentionnisme, montée de l'extrême droite et de ses thématiques, discrédit des représentants politiques traditionnels) sans (donner l'impression d') en chercher les causes et d'y remédier. 

La politique française (et européenne) gagnerait en crédibilité et en respect si elle faisait preuve d'humilité, de pédagogie envers (tous) les citoyens, et arrêtait de donner une image pitoyable de ses représentants. Car à trop crier au loup, encore et encore ("si ça continue comme ça, Marine Le Pen sera au second tour des présidentielles en 2017"), la prophétie se réalise, on l'installe dans la tête des gens et cela devient non seulement probable, mais de plus en plus souhaitable. 

RF

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Ce billet a été rédigé en écoutant l'album "You Go Girl" de Frank & Tony et "Shelter" de Moiré

mardi 25 novembre 2014

Une mobilité bruxelloise en quête de sens

Soyons de bons comptes, l'aménagement d'un grand espace piétonnier dans le centre de Bruxelles constitue un projet ambitieux et nécessaire pour le bien-être des gens (habitants de la zone, citoyens bruxellois et belges, touristes) ainsi que pour l'environnement. La récente étude sur la pollution à Paris vient notamment confirmer (toute proportions gardées) qu'un changement dans la mobilité urbaine est indispensable. 

Ce qui laisse perplexe, ce n'est pas tant ce qui va changer à l'intérieur de la Petite Ceinture (même si certaines réserves peuvent déjà être émises concernant le risque de créer un mini-ring), mais bien l'impact que ce nouveau projet a(ura) sur le reste de la Région. Le Pentagone n'est pas un îlot perdu au milieu des champs, mais une partie d'une ville composée de plusieurs communes. Communes qui, pour certaines, souffrent de problèmes de trafic parfois plus importants que dans le centre-ville (on pense, au hasard, aux extrémités de Woluwé-Saint-Pierre, Auderghem et Evere en bord de Ring ou le goulet Madou). 

Ce qui rend dubitatif, c'est le manque de vision holistique de la part des autorités bruxelloises, tous niveaux confondus. Une grande partie des voitures qui roulent aujourd'hui dans le centre n'y auront plus accès. A moins que les conducteurs décident de ne plus prendre leur voiture (on en doute), ces mêmes voitures rouleront en dehors du Pentagone, ajoutant des embouteillages, des énervements et des réactions en chaîne à des zones déjà encombrées. 

L'idée partant du principe que l'interdiction faite aux voitures d'accéder à un territoire délimité entrènera un changement de mentatlités dans leur mode de transport, ne tient pas forcément la route. Les conducteurs n'abandonneront pas, comme par magie, l'utilisation de leur quatre roues en ville, surtout s'il n'y a pas d'alternative efficace. 

Cette même idée pourrait par contre faire partie d'un plan global, incluant toutes les communes bruxelloises et de la périphérie, afin d'avoir une vue d'ensemble cohérente qui prennent tous les aspects (et tous les quartiers) en compte. A ce titre, les leviers sur lesquels il serait possible de jouer sont multiples: 

  • Investissement massif dans les transports en commun, tant en terme d'augmentation de lignes que de nombre de véhicules; 
  • Péage à l'entrée de Bruxelles afin de filtrer les allées et venues (manne financière qui permettrait également de supporter l'investissement en transports en commun);
  • Rôle accru de Bruxelles-Mobilité afin d'avoir une vision et un pouvoir de décision supérieur aux communes;
  • Développement de pistes cyclables cohérentes et sans risque (exemple parmi d'autres : trop souvent des pans de rues empruntés par les automobilistes sont également mis à disposition des cyclistes ce qui, même s'il y a un marquage au sol, expose ces derniers à des dangers);
  • Abandon (progressif) de la déduction fiscale des voitures de société au profit d'une fiscalité environnementale. 
Ces quelques éléments (il y en a d'autres évidemment) devraient être pris en considération dans leur globalité et non séparément, chacun d'entre eux venant en alternative à d'autres. 

Bruxelles (19 communes et périphérie) est confrontée à plusieurs défis de taille dont, notamment, la gestion de l'explosion démographique et les enjeux environnementaux (pollution, biodiversité, etc.). Son statut hybride (ville-région composée de communes dont le pouvoir est important) doit évoluer vers plus de concertation et de coordination entre les différents acteurs afin d'avoir une vision et une mise en oeuvre de politiques plus incluantes, qui permette de faciliter la vie des gens tout en préservant leur santé et l'environnement. D'autres villes (plus grandes, plus petites, plus vieilles, plus jeunes, plus riches, moins fortunées) l'ont réalisé. Il est temps maintenant que le grand Bruxelles s'y attèle. 

RF

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Ce billet a été rédigé en écoutant l'album "Patine" de Brns

vendredi 21 novembre 2014

De la reconnaissance, de la périphérie et du covoiturage : les trois faits marquants de la semaine (21/11)

Bonjour à toutes et tous, 

Au milieu de la masse d'informations qu'inonde l'être humain, il est parfois difficile de retenir certaines d'entre elles et de faire le tri. Voici donc les trois faits qui ont marqué mon attention cette semaine. Bonne lecture. 

- L'Espagne en passe de reconnaître la Palestine : et de trois en trois semaines. Après la Suède (qui l'a fait officiellement fin octobre) et le Royaume-Uni (via une motion de la Chambre des Communes), c'est au tour du Congrès espagnol d'appeler, à une très nette majorité, le gouvernement à reconnaître l'Etat palestinien. 

Côté pile: Des débats agitent également le monde politique français et, de son côté, la nouvelle Haute Représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères, Federica Mogherini, a plaidé récemment pour la même reconnaissance. C'est évident, le sujet est de plus en plus abordé en hauts lieux et présenté comme une solution aux conflits qui sévissent dans la région. L'institution d'un Etat palestinien ne peut avoir lieu que si une large majorité des grandes puissances (occidentales) le veulent et poussent pour y arriver. Un Etat permettra aux Palestiniens de bénéficier de droits, mais également de devoirs (on pense là par exemple à une délégitimisation du Hamas). Cela conduira également à un équilibre juste dans la résolution de conflit, le nouvel Etat palestinien se voyant porté au même rang qu'Israël dans le droit international. 

Côté face: Le sujet est compliqué (ou du moins est rendu difficile à cerner par certains) et des décisions rapides et non mûries (ou du moins non expliquées) pourraient déboucher sur une radicalisation (encore plus) importante de l'Etat d'Israël envers les Palestiniens, mais également envers ses principaux alliés, Etats-Unis en premier. Cela pourrait conduire à des pressions sur les différentes administrations et à durcir le ton (et le portefeuille) de certains bailleurs de fonds des candidats à l'élection américaine. Cela pourrait également, en fonction des événements à venir et des décisions et déclarations prises (on pense ici à l'actualité récente à Jérusalem), à une montée (encore plus importante) de l'antisémitisme.

- La "dénéerlandisation" de la périphérie : selon une étude réalisée par le Brabant flamand, les communes autour de Bruxelles accueillent de plus en plus d'habitants (12.000 entre 2006 et 2009) dont le néerlandais n'est pas la langue principale (et souvent, pas la langue du tout). Fait non négligeable : ces nouveaux brabançons flamands ne sont pas, dans leur majorité, francophones (comme cela a pu être synonyme de stéréotype pendant des lustres), mais d'origine "étrangère".

Côté pile: En conséquence de l'explosion démographique de la Région bruxelloise (qui ne fait que commencer), une solution pour apparemment plusieurs milliers de personnes est de quitter les frontières régionales de la capitale pour s'installer de l'autre côté du Ring, à une distance convenable (embouteillages exceptés) de leur lieu de travail et de l'école de leurs enfants (en territoire bruxellois) tout en profitant d'un ratio prix/mètre carré plus attractif et en disposant de plus de place. Cela montre, s'il le fallait encore, la grande quantité de liens socio-économiques entre le "centre" et la périphérie. Et d'ajouter de l'eau au moulin à un élargissement de Bruxelles qui, si géré de manière rationelle et pragmatique, permettrait d'harmoniser certaines politiques en matières de mobilité, d'immobilier, de fiscalité, etc.

Cela (pour rassurer les plus sceptiques), tout en préservant la langue néerlandaise. A ce titre, l'étude montre qu'une majorité des nouveaux habitants de la périphérie est déterminée à apprendre la langue de Vondel. 

Côté face: Une des raisons pour lesquelles cette étude sort maintenant est manifestement le fait que l'accueil des arrivants, leur parcours d'intégration et les cours de langues qui leur sont dispensés sont des compétences qui, à partir du 1er janvier 2015, passent de la province (ici en l'occurence le Brabant flamand) à la Région flamande. Et qui à la main en Flandre? La N-VA qui non seulement affiche une certaine antipathie envers les francophones, mais qui, surtout, défend bec et ongles tout se qui permet de donner de l'ampleur à une identité flamande. 

Un changement de statut de certaines communes flamandes, un rapprochement avec Bruxelles, pourraient se heurter à un dogmatisme flamingant et voir se renforcer les différences entre périphérie et capitale pour (ré)affirmer le caractère flamand de ces communes. On perdrait alors du temps et surtout une occasion (unique?) de redynamiser Bruxelles et les communes. 


- La montée en puissance du co-voiturage. La société Uber a réalisé (au moins) deux bons coups de communication dernièrement (même s'il y a eu aussi des râtés) : l'alternative aux taxis en temps de grève et le partenariat avec Brussels Airlines. Si le système de covoiturage est défini comme illégal par le gouvernement bruxellois, il continue néanmoins à être opérationnel, à exercer une pression sur les autorités et à surfer sur cette illégalité


Côté pile: Cela offre de nouvelles possibilités pour les personnes désireuses de se déplacer en voiture sans conduire. Que ce système soit une menace directe envers les chauffeurs de taxis est évident. Mais au lieu d'interdire un concept qui non seulement existe dans plus de 200 villes, mais également dans lequel Google a investi (et qui donc ne devrait pas finir demain), les autorités (associées aux compagnies de taxis) devraient revoir les services de voiturage, les réformer, les dynamiser, les moderniser. Et associer les sociétés comme Uber afin de proposer une offre globale et éviter de monter les camps les uns contre les autres. D'autant plus que le professionalisme et les compétences de certains chauffeurs de taxis, voire de certaines compagnies en général, laisse plus qu'à désirer pour une ville qui se veut internationale (et capitale de l'Europe). 

Côté face: Cela crée (et va créer encore davantage) de mécontentements et de colère dans le chef des chauffeurs et sociétés de taxis avec, potentiellement, des débordements comme en France cette année. La manière dont Uber tente de s'imposer n'est pas pour calmer ces mécontentements car elle paraît comme un passage en force, ne tenant pas compte, voire ne respectant pas du tout, les impacts sur les professionnels du secteur.  

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Bon week-end! 

RF

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Ce biller a été rédigé en écoutant l'album "Turning" d'Antony & The Johnsons

mardi 18 novembre 2014

Une Belgique neutre et discriminatoire

Et voilà que revient la sempiternelle antienne relative aux signes religieux dans l'espace public. Comme le refrain d'une chanson conservatrice et de repli qui refait son apparition tous les 4-5 ans. 

Partons du principe que la décision du gouvernement fédéral (interdire le port de signes religieux, politiques et philosophiques pour les fonctionnaires fédéraux en contact avec le public) ne vise aucune communauté en particulier. Quelle est le but visé? Le gouvernement se réfère à une loi de 1937, laquelle édicte que "(...) l'agent de l'Etat évite toute parole, toute attitude, toute présentation qui pourrait être de nature à ébranler la confiance du public en sa totale neutralité, en sa compétence ou en sa dignité." Il s'agirait donc de veiller à la neutralité du fonctionnaire public.  

A nos yeux, neutre ne veut pas dire aseptisé, sans particularité, sans personnalité. Le fonctionnaire, fédéral, régional, communal, européen, est neutre dans la manière dont il traite les dossiers, dont il s'adresse aux citoyens, dont il fait preuve de sens professionel. Porter une kippa, un t-shirt avec Che Guevara ou un pin's arborant la flamme laïque ne présuppose pas que le citoyen se verra traité différemment, que le service qui lui sera apporté sera biaisé. Le penser, et en faire découler une décision politique, relève du procès d'intention. 

Qu'est-ce qui dérange tellement dans le signe religieux? Qu'est ce qui me fait craindre une différence de traitement selon que le fonctionnaire en face de moi arbore une croix plutôt qu'un t-shirt de Marylin Manson (au hasard) et des tatouages celtiques sur ses avant-bras (toujours au pif)? 

Si on examine de plus près cette décision, et qu'on va au-delà de la liberté (bafouée) de porter le vêtement que l'on souhaite, on voit deux autres limites à cette décision qui portent atteinte, eux, aux droits de l'Homme: 

- une discrimination religieuse, surtout envers les musulmans et les juifs. Soyons de bon compte, le fonctionnaire chrétien qui se voit interdire le port ostentatoire de son appartenance religieuse pourra mettre sa croix en dessous de son polo ou de son chemisier. Qu'en sera-t-il des hijabs, tchadors et kippas? Sachant que le port de ces derniers fait partie intégrante de la foi des personnes qui les coiffent, ces dernières devront soit changer de département (si possibilité il y a), soit tout simplement changer d'employeur. 

- une discrimination de genre : on le répète, les personnes les plus exposées à cette décision sont, à nos yeux, les fonctionnaires de confession juives et musulmanes. Parmi ces derniers, les hommes ne sont pas tant touchés vu qu'il s'agit surtout de viser les signes ostentatoires, à savoir, en l'occurence, le foulard islamique, porté par les femmes.

Nous ne connaissons pas les chiffres des personnes portant des signes religieux ostentatoires dans les administrations publiques. Mais, même si l'on parle ici d'une minorité de personnes affectées par cette décision, il s'agit d'une stigmatisation claire et nette envers des personnes en fonction de leur appartenance religieuse, philosophique, etc. 

Il serait plus intelligent (et plus porteur) de concentrer les efforts sur la promotion de la tolérance, de la diversité, du multiple, du vivre ensemble. Afin, peut-être un jour, de ne pas changer de file parce que la fonctionnaire est voilée, mais y rester car cela sera normal, cela fera partie, pour tout un chacun, de la composition de société telle qu'elle est (déjà aujourd'hui). 

RF

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Ce billet a été rédigé en écoutant Radio Meuh