vendredi 31 octobre 2014

Facebook, nouvelle agence de presse mondiale

Je dois bien l'avouer, je ne suis plus allé sur la page d'accueil d'un site d'information depuis plusieurs mois. Mis à part la lecture régulière d'un quotidien et d'un newsmagazine tous deux au format papier, mes principales sources d'information sont les médias sociaux, singulièrement Facebook et Twitter. C'est d'ailleurs sur le premier de ceux-ci que j'ai été interpellé par un article repris par Courrier International sur l'importance que le site de Mark Zuckerberg a pris dans le secteur de l'information au niveau mondial. 

Le flux d'actualité de Facebook (qui regrouperait plus de 1,3 milliards d'utilisateurs actifs) fonctionne selon un algorithme bien défini. Contrairement à d'autres générateurs de contenus, les "news" qui s'affichent ne dépendent pas que d'un critère chronologique (comme Twitter par exemple) ou de centre d'intérêt (Feedly, Pulse), mais également en fonction de ce que j'ai lu (ou simplement cliqué) précédemment, de ce que mes "amis" ont également vu et apprécié et du "buzz" que génère tel ou tel lien. 

Je tombe donc de plus en plus sur des informations qui sont définies non pas par des critères d'informations classiques, mais bien par des modes d'utilisation, de consommation. Plus un lien est cliqué, aimé, commenté, partagé, plus j'aurai l'occasion de le voir apparaître dans mon fil d'actualité. 

D'un côté, cela me permet d'être "à la page", d'être au courant en un coup d'oeil (ou presque) des faits d'actualité principaux du moment. Ou en tout cas de ceux qui rencontrent une attention certaine tant de la part des médias qui publient le lien (toutes les articles d'un site d'information ne sont pas reprises sur Facebook) que des utilisateurs. 

D'un autre côté, j'ai de moins en moins l'occasion de tomber sur un article "différent", comme lorsque l'on feuillette un journal ou magazine, ou lorsqu'on va sur la page principale d'un newsmedia en ligne. Et plus j'utilise Facebook comme source d'information, moins ce dernier agit comme un réseau social, car moins je vois ce que mes "amis" postent sur leur profil. 

Mais bon, ceci pourrait être facilement changé si je faisais preuve de moins de fainéantise et que je variais davantage mes sources, me direz-vous. 

Plus inquiétant, par contre, est l'impact que cette transformation de l'algorithme de Facebook a(ura) sur le monde des médias et du journalisme. Déjà principalement dépendants des revenus publicitaires, les sites d'informations ont dorénavant également besoin d'exister sur Facebook, de générer le débat, de frapper fort afin d'être non seulement aimé, mais surtout, consécration suprême sur le réseau social, d'être partagé. 

Cela ne pose pas spécialement de problème apparent pour des géants de l'information tels que le Huffington Post, le Guardian ou le New York Times, par exemple, respectivement 1er, 6e et 8e des sites les plus partagés sur Facebook en septembre 2014, toutes catégories confondues.  Cela endommage par contre la visibilité de médias plus petits, plus thématiques, voire moins consensuels.

Facebook poursuit des objectifs financiers et boursiers définis. Le site regorge de créativité pour attirer annonceurs et marques les poussant à l'utilisation payante de son site. Car une autre manière de faire remonter une information dans le fil d'actualité, c'est tout simplement en achetant des "likes" ou en payant pour que son "post" soit boosté. 

Facebook devriendait une agence de presse mondiale qui, contrairement aux flux des agences classiques, ne reprendrait pas tous les sujets, mais les sélectionnerait en fonction de leur potentiel d'intérêt (et non d'importance) et de ce que tel ou tel média aura payé pour renforcer cette importance. 

RF

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Ce billet a été rédigé en écoutant l'album "Kiasmos" de Kiasmos

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